le 9 février 2018 - par Mélanie BOURDON
Culture. Mercredi, le Drakkar présente une pièce montée par une Dieppoise, jouée par des Dieppois et financée par Dieppe Scène nationale. Un pur et beau produit de la cité d’Ango.
Sur scène, des buissons bleus surgissent, des signes au sol, le décor d’une histoire pas comme les autres qui a profondément marqué Louise Dudek à la première lecture : « J’ai été touchée par la thématique, ça pouvait faire un spectacle sensible et beau ».
Louise Dudek, 33 ans, est une metteuse en scène dieppoise. Elle présente pour la première fois, mardi, la pièce La Rage au Drakkar. Elle évoque son parcours et sa passion : le théâtre.
D’où vous vient cet amour du théâtre ?
J’avais fait un atelier théâtre lorsque j’étais petite… Puis j’ai pris l’option théâtre au lycée. Et j’ai vraiment aimé. Je suis entrée en hypokhâgne à Paris où j’ai choisi l’option théâtre. J’ai également fait trois ans de conservatoire. Au cours de mes études, j’ai été beaucoup sur les plateaux, comme actrice, puis j’ai eu l’occasion d’écrire des spectacles. J’ai découvert la mise en scène. J’ai participé trois années au concours du Théâtre du Rond-Point et j’ai été sélectionnée à chaque fois. La deuxième année avec deux projets mis en scène.
Qu’avez-vous apprécié dans cette expérience ?
C’est incroyable d’entendre ses textes sur un plateau. J’ai su que ma place était ici : metteuse en scène.
Quels diplômes avez vous ?
J’ai un master en mise en scène et dramaturgie et un master en lettres anglaises spécialisé en théâtre contemporain.
Avez-vous monté beaucoup de spectacle ?
J’ai beaucoup travaillé comme assistante de metteur en scène. C’est un vrai métier. J’ai co-monté deux spectacles jeunes publics. La Rage est la deuxième pièce que je monte seule. J’ai passé un an au conservatoire avec Fanchon Tortech. Elle allait publier ce texte et m’a proposé de le lire. J’ai eu un immense coup de cœur. Cela fait trois ans que je travaille dessus. Je mets en scène seule mais j’ai beaucoup parlé avec l’autrice. Elle a suivi les différentes étapes.
D’où vient cette idée de décor ?
J’ai beaucoup discuté avec la scénographe. Les deux personnages sont dans des situations inextricables. Il est question de frontières, de celles que l’on passe. Il est également question de tatouage puisque Maï, le personnage masculin, est tatoueur. D’où les dessins au sol. Il y a également du dessin animé réalisé à la main par Alice Saey.
Le choix de votre équipe ?
J’avais déjà travaillé avec Léa Perret et Vincent Marguet. Ils correspondaient parfaitement à l’image que j’avais des personnages. Rémi Peray, je l’ai rencontré dans un festival, et je voulais travailler avec lui. Il crée des musiques incroyables. Jérôme Bertin est arrivé au début aussi. Il est régisseur général et s’occupe également des lumières. Heidi Fiollet, la scénographe, est arrivée la dernière.
Avez-vous peur de rencontrer votre public ?
Non, nous avons hâte. Nous avons réalisé des ateliers avec des adolescents et ils ont réagi avec beaucoup de ferveur. Le fait que l’histoire se déroule lors de la Première Guerre mondiale leur permet à la fois de s’identifier et de mettre de la distance avec les personnages. Mardi, nous présenterons la pièce aux scolaires et nous organiserons une rencontre pour en discuter avec eux juste après. Mercredi, la séance est déjà pleine et il y a une liste d’attente…
Vos projets ?
L’an prochain, je présente un spectacle cabaret, Presqu’île, de Sarah Pèpe. Il évoque la féminisation de la langue française et notamment du mot « autrice ».
« La Rage » de vivre l’adolescence… puis la vie !
La pièce de Fanchon Tortech, La Rage, est une histoire de guerre, mais pas que. Ce sont aussi les interrogations adolescentes, les premiers pas dans la vie d’adulte, sa liberté et ses déceptions, une histoire de rencontre entre deux cultures, une histoire de frontière… C’est tout cela que l’autrice met dans son texte : « La Rage se passe en 1915 ; c’est une histoire d’éclats d’obus et de soleils percés, du temps où les garçons jouaient encore à la guerre, et les filles à la poupée. Maï, 19 ans, marin et déserteur, croise la route d’Anna, 16 ans, mariée et déjà veuve aux premières tranchées. Pour l’un comme pour l’autre, l’horizon est bouché, et pourtant… Maï et Anna, à petit feu, vont se redonner l’un à l’autre le goût des vents du large. Jusqu’au drame ? Ce n’est sans doute pas une histoire d’amour, mais d’adolescence à fleur de peau, de tatouages, de bords de falaises et d’appels d’air ». L’écrivaine a souhaité un texte fort qui parle aux adolescents d’aujourd’hui à travers l’histoire de jeunes d’hier : « Les adolescents d’aujourd’hui ont le choix, en France, du moins, si on croit ce qu’on en dit. Choisir son orientation,
notamment : l’orientation la bien nommée… Mais sait-on s’orienter, s’en aller à l’Orient ; est-ce qu’on va quelque part, vraiment, quand on attend que l’heure de cours se passe, que la nuit tombe, que l’année file ? Pour être au bout de tout plus libre, mais plus libre de quoi ? Je voulais ça, parler de leurs vertiges, de ce temps qui s’étire, et de l’instant surgi où l’on décide, allez savoir pourquoi, d’avoir le choix. Ou bien qu’on ne l’a plus. »
Mélanie BOURDON
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